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Légende urbaine, infox, creepypasta … Définitions et exemples

Peut-on différencier une rumeur d’une légende urbaine ? En quoi « fake news » est-il un terme controversé ? Les creepypastas sont-elles de simples légendes circulant sur le web ? Cette typologie des principaux récits décryptés par Spokus devrait vous aider à y voir plus clair !

[Définitions]
Chaîne magique / Creepypasta / Fake news (infox) / Glurge / Information parodique / Légende urbaine / Ostension / Rumeur / Théorie du complot

Chaîne magique

Une chaîne magique est un message qui encourage explicitement celui qui le reçoit à le transmettre à un nombre déterminé ou indéterminé de destinataires. Cette injonction peut s’accompagner de menaces en cas de non-transmission ou de destruction de la chaîne (survenue de malheurs …). La chaîne peut aussi faire miroiter la promesse d’un grand bonheur, de gain d’argent…etc.

D’autres types de chaînes ont des pseudo-objectifs humanitaires, comme les chaînes de solidarité, ou se présentent sous la forme d’une pétition.

D’abord transmises par courrier, les chaînes ont suivi l’évolution des moyens de communications en circulant par mail, SMS puis sur les réseaux sociaux.

Sources :

Michel-Louis Rouquette, Les chaînes magiques, Delachaux et Niestlé, 1994.

Les chaînes de prières pendant la Première Guerre mondiale, sur Spokus.

Exemples

Chaîne de saint Antoine

On me l’envoie je vous l’adresse. Cette chaîne vient du Venezuela elle été écrite par un légionnaire et doit faire le tour du monde. Même si vous êtes pas croyant faites attention ce qui suit :
M. Bayon la reçoit fait faire 24 copies par sa secrétaire et voit sa situation s’améliorer.
M. Marneau la reçoit fait faire 24 copies, 9 jours plus tard il gagne 9 millions à la Loterie Nationale
M. Bon la brûle, sa maison est détruite, ses parents perdent la vie, et lui se retrouve hôpital de Bagnolet.
M. Rovaille la jette, huit jours plus tard il est tué.
M. Petit l’oublie, il perd sa situation ; il la retrouve fait des copies les envoie et se fait attribuer un poste plus important.
En aucun cas cette lettre ne doit disparaître, faites 24 copies et dans 9 jours un événement heureux vous arrivera.
[Exemple relevé par Jean-Pierre Albert dans « La chaîne et la chance », Archives de Sciences sociales des religions, n°86, 1994]

Glurge* circulant sous forme de chaine :

[Fr]Totem Tantra de Yann Gourvennec

 

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Creepypasta

La creepypasta est une forme de mème (élément ou phénomène repris et décliné en masse sur internet) et, dans ses versions plus élaborées, de récit fantastique apparu sur le web. Son contenu est terrifiant ou troublant. De source indéterminée, et parfois attribuée à un ou plusieurs auteurs, la creepypasta peut prendre la forme d’une image, d’un texte, d’un texte enrichi d’images, d’une vidéo, … etc ou d’un mélange de différents médias orchestrés par un fil narratif. Elle est presque toujours présentée comme vraie : dans sa version narrative, elle s’appuie sur une abondance de détails, de références directes ou indirectes à des preuves (images, sons … etc) ou à des documents. Ces preuves étant, dans la plupart des cas, fabriqués de toutes pièces, l’historicité de la creepypasta est toujours fausse ou douteuse.

La creepypasta circule exclusivement sur le web, sous forme de copier-coller ou de partages. Elle peut également faire l’objet d’adaptations d’un média web à un autre, de récits dérivés ou de récits crées à partir d’un mème de départ (comme le personnage Slender Man).

Origine

[Anglicisme] Mot-valise formé de l’anglais creepy (terrifiant, troublant) et de copypasta (néologisme qui désigne des textes copiés et collés en masse sur les forums et réseaux sociaux, lui même dérivé de copy-paste = copier-coller). Le terme creepypasta est attesté depuis 2007 d’après Know Your Memes.

Exemples

→ Creepypastas, légendes et écritures du web

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Fake news (infox)

Une fake news est une information créée de toutes pièces dans un but de désinformation et qui emprunte les codes de l’écriture journalistique.

L’expression fake news est également utilisée par certains personnages politiques ou groupes militants pour disqualifier toutes les nouvelles jugées erronées ou hostiles à leur égard, ou allant à l’encontre de leur corpus idéologique. Cette déviation du sens premier est due principalement à son usage par le Président Trump.

En français, fake news est souvent employé pour qualifier toute information fausse, y compris lorsqu’elle résulte d’une erreur, ou pour désigner des articles parodiques.

Pour ces raisons, certains journalistes encouragent son abandon, parfois au profit du néologisme français infox, ou de l’expression américaine junk news.

Origine

[Anglicisme] De l’anglais fake (faux, contrefaçon, imitation) et news (nouvelle). Premières traces écrites dans la presse américaine des années 1890. Cette expression s’est toutefois popularisée au lendemain des élections présidentielles américaines de 2016.

La commission d’enrichissement de la langue française recommande depuis 2018 l’usage du terme infox, mot valise formé d’intoxication et d’information.

Sources :

Arnaud Mercier, « Fake news : tous une part de responsabilité« , The Conversation, Mai 2018.

Marie Peltier, « La polarisation du récit » dans Obsession : dans les coulisses du récit complotiste. Inculte, 2018.

Exemple

→ Macron financé par l’Arabie Saoudite (Les Décodeurs, 2017)

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Glurge

Le glurge est un récit chargé d’émotions, parfois attendrissant ou mélodramatique à l’excès, faisant réagir le lecteur grâce à des thèmes comme les relations familiales, la maladie, le handicap … etc afin de lui transmettre une « leçon de vie ».  Présentés comme des anecdotes réelles, parfois assorties de commentaires moraux, les glurges circulent le plus souvent sous forme d’images ou de publications Facebook, de diaporamas décorés d’images kitsch, ou de chaînes*.

Origine

[Anglicisme] Formé d’une onomatopée anglaise exprimant le vomissement (et la saturation causée par le caractère sirupeux des glurges !), le terme glurge a été inventé en 1998 par Patricia Chapin, contributrice de Snopes.com.

Sources :

Véronique Campion-Vincent et Jean-Bruno Renard, « La course aux handicapés » et « La culotte de dentelle », dans 100% Rumeurs, 2014.

Exemple

Dans « La course aux handicapés » (V. Campion-Vincent & J-B. Renard, 2014), les athlètes courant le 100m aux Olympiades des handicapés de Seattle de 1984 s’interrompent pour aider un garçon qui chute au moment de la course. Une fille atteinte du syndrome de Down console même le coureur éploré. Ils franchissent ensemble la ligne d’arrivée. Le glurge se conclut sur la morale suivante :

« Les personnes qui l’ont vu en parlent encore. Pourquoi ? Parce qu’au fond de nous, nous savons que la chose la plus importante dans la vie est bien plus que de gagner pour soi.

La chose la plus importante dans la vie, c’est d’aider les autres à gagner. Même si cela implique ralentir et modifier notre course.

Alors, aujourd’hui, qui pourrais-tu aider à gagner ?

Anonyme »

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Information parodique

Une information parodique est une information créée de toutes pièces dans le but de faire rire, de faire la satire d’une mesure politique ou d’un personnage public, d’un fait de société, d’une institution … etc, ou de piéger les lecteurs par un canular. Elle reprend les codes de l’écriture journalistique, en ayant notamment recours à l’exagération ou à l’inversion du sujet traité. Elle est généralement publiée sur des médias qui imitent les sites web des grands titres de la presse traditionnelle, avec une intention parodique annoncée de manière plus ou moins ostentatoire (par un titre ou un slogan volontairement absurde, un « à propos » qui précise les réels objectifs du site… etc).

Sources : Information parodique sur Wikipédia.

Exemples de sites d’information parodiques

→ Le Gorafi

→ Science Info

→ L’écho de la Boucle

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Légende urbaine

La légende urbaine est une histoire courte, au contenu surprenant ou mystérieux. Elle est racontée comme vraie mais son historicité est fausse ou douteuse. De source indéterminée, elle circule de bouche-à-oreille, sur les réseaux sociaux ou par d’autres moyens de communication informels.

Bien qu’elle se présente comme étant arrivée récemment, à l’ami d’un ami, ou qu’elle fasse référence à des noms de lieux, d’organismes ou de marques connus,  une légende urbaine peut apparaître ou réapparaître à des époques ou en des lieux parfois très éloignés. On parle alors de variantes : la structure du récit est sensiblement la même, mais les personnages, lieux … etc peuvent changer et s’adapter à un nouveau contexte. Les légendes urbaines font également l’objet de reprises dans des films, bandes-dessinées, romans…etc.

La légende urbaine véhicule une morale implicite, le plus souvent conservatrice. Elle « exprime de manière symbolique les peurs et aspirations [du milieu social dans lequel elle circule] », comme les craintes liées au développement des nouvelles technologies, ou à l’insécurité du monde extérieur. En tant que conte de prudence, la légende urbaine peut également nous dissuader d’adopter certains comportements risqués ou s’écartant des normes sociales, en illustrant leurs conséquences supposées pour d’autres individus.

Origine

De l’anglais urban legend, première trace écrite en 1968 d’après Wikipédia ; l’expression a été popularisée par Jan Harold Brunvand en 1981.

L’expression « légende contemporaine » a été relevée dans une revue de la fin du XIXe par Jean-Bruno Renard, période où apparaît un intérêt pour les croyances récentes et le folklore des villes parmi les folkloristes.

Source :

Jean-Bruno Renard, Rumeurs et légendes urbaines, PUF, 2006.

Glossary, Snopes.com.

Exemples

→ Les faux médecins de Daech

→ Légendes urbaines d’enterrement de vie de jeunesse

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Ostension

On qualifie de phénomène d’ostension le comportement d’individus réels qui imitent le scénario d’une rumeur* ou d’une légende urbaine*, qu’ils y croient ou non.

Origine

D’ostension, « action de montrer« . Terme introduit dans la terminologie folklorique dans les années 80 par les folkloristes américains.

Sources :

Jean-Bruno Renard, Rumeurs et légendes urbaines, PUF, 2006.
Dégh, Linda; Vázsonyi, Andrew (1983). « Does the Word ‘Dog’ Bite? Ostensive Action: A Means of Legend Telling ». Journal of Folklore Research. 20: 5–34.

Exemple :

→ Les « clowns agressifs » de 2014.

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Rumeur

La rumeur est une information brève, transmise de bouche à oreille et objet de transformations continuelles. Elle porte sur l’actualité et son contenu est, dans la majeure partie des cas, négatif. Contrairement à la légende, la rumeur a toutefois tendance à prendre pour sujet une personnalité ou un produit identifié et elle se limite à une forme de type Sujet + Prédicat [état ou action prêtée au sujet] ; par exemple : [Le Président de la République] + [mène une double vie].

Certaines rumeurs peuvent se développer et s’incarner dans un récit légendaire (et inversement une légende urbaine* se synthétiser en un énoncé), comme le suggère Jean-Bruno Renard (2013) avec l’exemple des alligators dans les égouts de New-York :

« Il y a des alligators dans les égouts de New-York » est la forme brève, rumorale, de l’histoire des New-Yorkais qui ramènent de Floride des bébés alligators et qui se débarassent de leurs animaux devenus encombrants en les jetant dans les toilettes ; de là les reptiles se multiplient, devenus aveugles et blanchâtres à cause de l’obscurité » [Jean-Bruno Renard, Rumeurs et légendes urbaines, PUF, 2013].

Enfin, plus les transmetteurs se sentent concernés par la rumeur, plus ils ont tendance à la propager ; on parle d’implication.

Origine

Du latin rumor, « bruits vagues », « propos colportés ». Rumeur désigne à la fois le bruit produit par une foule et une nouvelle sans certitude, transmise de bouche à oreille.

Sources :

Jean-Noël Kapferer, Rumeurs, Seuil, 1987.

Jean-Bruno Renard, Rumeurs et légendes urbaines, PUF, 2013.

Martine Roberge, De la rumeur à la légende urbaine, Presses universitaires de Laval, 2010.

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Théorie du complot

Les théories du complot proposent une vision uni-causale de l’Histoire ou de l’actualité, où les événements sont avant tout le produit des actions secrètes et concertées d’un groupe de personnes (société secrète, gouvernements, industries, minorités, … etc) qui cherchent à poursuivre leurs intérêts particuliers ; et où les différents rouages et institutions de la démocratie sont vus comme des pantins au service de ce même groupe, chargés de tromper notre vigilance.

A partir d’une série de faits réels, les théories du complot proposent une narration où les coïncidences, des extraits visuels ou textuels … etc, sont réinterprétés ou sortis de leur contexte pour démontrer l’existence de ces actions secrètes ; le point le plus extrême de cette réinterprétation du monde étant, par exemple, la vision de symboles cachés dans des images anodines, souvent le fruit d’un phénomène de paréidolie.

Sources :

Didier Desormeaux et Jérôme Grondeux. Le complotisme : décrypter et agir, Canopé, 2017.

Théorie du complot, Wikipédia.

Exemple :

→ Neige artificielle : une théorie tombée du ciel ?

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Image à la Une : Alphabet ornemental du XVIe siècle. Delamotte, F., vectorized & restored by JovanCormacDelamotte, F.: “Ornamental Alphabets, Ancient and Mediæval” (1879) – provided by From Old Books.

2 réponses sur « Légende urbaine, infox, creepypasta … Définitions et exemples »

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